REGARD SUR
UN VOYAGE AU PORTUGAL
Curieusement, lorsqu’on évoque le Portugal, la couleur noire remonte à la surface de ma mémoire. Pas un noir triste, loin s’en faut. Plutôt comme un liseré qui vient sublimer toutes les autres couleurs du pays. Le noir du porto, celui du Douro, celui du gilet des hommes ou du foulard porté par des veuves. Un révélateur de lumières en somme. Et le Portugal n’en manque pas dans son étincellante palette de verts, de jaune, de ses paysages, des camaieux de bleus de ses ajulezos, comme dans les clair-obscur ses monuments ou ses lieux historiques. En bord de mer, en ville, à la campagne, le pays a de prime abord des allures méditerranéennes. Mais non. Et l’Atlantique de nous le rappeler promptement.
A Porto, Tiago nous attendait, impatiemment.
Il avait raison. La Vallée du Douro nous a comblés. Ses pentes vertes, les escales dégustation des enseignes britanniques du breuvage. Et la ville de Porto, si belle et si « fado »avec ses façades noircies de suie, ses terrasses joyeuses, ses quais qui bordent le fleuve et ses plongeurs de rue de haute voltige depuis ses ponts. Ici comme ailleurs la modernité flirte avec la tradition.
En séjour dans la flamboyante Lisbonne, j'ai pris le tramway aussi pittoresque qu'efficace pour arpenter la ville en collines.
Stratégique observatoire du monde. Un transport propice aux rencontres. J’avais rendez-vous avec Alba, une artiste peintre aristocrate, au Café A Brasileira, dans le quartier élégant et bohème du Chiado. Entre deux savoureuses pasteis de nata, qui vous envoient au ciel, j’ai reçu d’Alba, quelques clés qui m’ont éclairé.
Aux confins de l'Europe, au confluent de la terre et de l'océan, ce petit pays, s'est forgé une identité particulière, teintée d'influences.
Une culture issue d’une histoire dense et fluctuante, marquée par des sommets et des troubles. Le faste et l’indigence. La répression et la movida. La récession et la renaissance.
J’aime le tempérament de son peuple. Cette humilité qui frise l’effacement mais laisse deviner un sens des valeurs bien ancré, le prix des choses et force le respect. Car on ressent ici une envie de vivre, de bien manger dans tous les sens du terme, de rattraper le temps, d’attraper celui présent. On y mange bon et copieusement.
J’ai poursuivi vers le quartier du Bairro Alto, me suis arrêté un instant Place Luis de Camoes pour imaginer l’exaltation des partisans de la Révolution des Oeillets.
Plus tard, des amis m’ont rejoint. Nous avons pris une ruelle où flottait du linge sur des fils tendus. Des boutiques concept- stores alternent avec des bars trendy et des épiceries traditionnelles. Maria nous a convaincu sans effort de faire un tour vers Sintra et ses somptueux palais, manoirs, ses jardins et l’époustouflant littoral de la Serra de Sintra exposé aux assauts de l’océan. Nous avons mangé des sardines grillées sur une plage. Sous le soleil haut dans le ciel, le vent emportait nos chapeaux mais pas notre indefectible enthousiasme.
Prochaine étape, au sud vers la radieuse Algarve
où les plages peuvent braver celles de Californie. Nous prendrons le train.